La téléréalité fête son 40e anniversaire
Quebecor
Mine de rien, la téléréalité célèbre cette année son 40e anniversaire de naissance. Comme le rappellait récemment Nathalie Collard, journaliste au quotidien La Presse, cette « vache à lait de la télé » a transformé l’univers des médias grand public.
On s’entend pour dire que la première émission empruntant directement à la téléréalité a été diffusée en 1973 à la chaîne américaine Public Broadcasting System (PBS). Il s’agit d’un documentaire réaliste intitulé An American Family, alors expérimental, qui présente la vie d’une famille blanche, cultivée, de classe moyenne.
Pendant sept mois, le producteur Craig Gilbert filme les moindres gestes de la famille Loud (300 heures de tournage au total). Lors de la présentation de l’épisode final, plus de 10 millions de téléspectateurs regarderont l’émission que l’on présentera alors comme une expérience de nature sociologique.
Malgré ce succès immédiat de cote d’écoute, le documentaire intimiste ne gagne que lentement en popularité. En 1974, la BBC propose The Family, un concept semblable à celui de PBS. Huit ans plus tard, la chaîne australienne ABC lance à son tour une émission qui s’inspire de la série An American Family.
En 1982, la grève de 22 semaines des scénaristes va obliger les grands réseaux américains à revoir en profondeur leur stratégie de programmation. Pour se prémunir contre les effets de la grève tant sur le plan de la programmation que sur celui des cotes d’écoute, les réseaux CBS, ABC et NBC vont commander des dizaines de séries s’apparentant à la téléréalité.
En 1987, il y a déjà 37 émissions de téléréalité aux États-Unis. Ce nouveau genre a l’avantage de mettre en scène des gens ordinaires, et il ne nécessite pas a priori de scénarisation ou d’acteurs connus.
Lorsque la chaîne MTV lance The Real World, en 1992, on qu’on assiste à l’émergence d’un nouveau genre. Dans cette téléréalité, sept jeunes âgés de 18 à 25 ans partagent une maison ou un appartement. Chaque épisode dure 22 minutes et les caméras sont omniprésentes – on filme dans toutes les pièces, sauf dans la salle de bain. En 1994, la série fut l’une des premières à mettre en scène un participant séropositif.
Avec l’émergence de nouvelles émissions au milieu des années 1990, la téléréalité s’internationalise. Cette téléréalité de seconde génération provient des Pays-Bas, de la Suède, de la France, de l’Australie, du Japon et de la Grande-Bretagne.
En Suède, la série Expedition Robinsonest vendue dans une vingtaine de pays. En Grande-Bretagne, la téléréalité Changing Rooms lancée en 1996 met en vedette des couples chargés de redécorer leur maison. En France, l’émission Perdu de vue tente de réconcilier des couples.
Officiellement, le concept de la téléréalité émerge en 1994 dans la tête de Joop Van Ende et John De Mol, fondateurs de la société de production néerlandaise Endemol.
John De Mol est un producteur d’émissions de télévision et il travaille brièvement à la radio. De son côté, Joop Van Ende possède une entreprise spécialisée dans le multimédia, le divertissement et le théâtre commercial.
Au milieu des années 1990, la télévision des Pays-Bas se globalise et Endemol vend sa recette aux différentes télévisions du monde. C’est à ce moment que De Mol et Den Ende fusionnent leurs entreprises.
En 1996, l’entreprise inscrit ses actions à la bourse d’Amsterdam et elle étend ses ramifications au Portugal, au Danemark, en Espagne et en Allemagne.
Contrôlée par le géant espagnol Telefonica qui en a fait l’acquisition au coût de 5 milliards $ de dollars américains en 2000, la transaction dessine les contours d’un nouvel ordre médiatique.
En 1997, lorsque le chanteur Bob Geldof propose Exposition Robinson à la télévision suédoise, la téléréalité entre de plein pied dans son âge d’or.
Développée par Planet 24, l’action se déroule généralement sur une île déserte. Lors de la diffusion initiale en Suède, le premier participant éjecté par le vote populaire se suicida, ce qui suscita un important débat moral dans tout le pays.
En 1999, l’émission Big Brother, présentée initialement aux Pays-Bas et vendue dans plus de 70 pays, introduit le temps réel par la diffusion en direct. Autre nouveauté, il est possible d’observer les participants 24 heures par jour, grâce à Internet.
En 2000, CBS présente la première de Survivor, une adaptation de Expedition Robinson. Mark Burnett, un ancien parachutiste, est le créateur de Survivor. Le premier épisode de la série attire 15,5 millions de téléspectateurs.
Lors de la finale présentée le 16 août, 51 millions de personnes sont rivées à leur écran. L’émission culte pave la voie à toute une série d’émissions incluant The Mole (2001), Fear Factor (2001) et The Amazing Race.
Au Québec, les téléréalités Star Académie, Occupation double, Facteur de risques et La Voix ont fait le délice des téléspectateurs.
Même si certains échecs laissent entrevoir une éventuelle lassitude du public, on peut penser que la téléréalité est là pour durer. Les liens qui unissent convergence, marketing et divertissement populaire sont solides. Ils expliquent en partie pourquoi la téléréalité est devenue un espace incontournable dans le secteur des médias.
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Comment expliquer le succès de La Voix ?
Entrevue avec Marie-France Bazzo sur la téléréalité
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